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Rapide tour du monde...

lundi 19 janvier 2004, par polars

Italie :

Sans remonter à la création en 1929 de la plus célèbre des collections policières italiennes (Libri Gialli Mondadori) à Milan, prenons le train en marche, en 1966 plus exactement, avec la publication de la première aventure de Duca Lamberti, médecin radié de l’ordre et collaborateur de la police, personnage principal de Vénus privée de Giorgio Scerbanenco. Durant quatre romans, le bonhomme sévit à Milan dans un climat d’extrême violence qui vaut à son auteur le titre de « père du roman noir italien ». Son oeuvre, il est vrai, est un succès public considérable et inaugure l’essor international du polar italien. Il est relayé en 1972 par le tandem Carlo Fruttero-Franco Lucentini avec La Femme du dimanche qui se déroule à Turin. Huit ans plus tard, une autre bombe éclate avec Le Nom de la rose d’Umberto Eco, qui en mêlant investigation et Histoire, influence nombre d’auteurs. La suite appartient aux tenants du noir à l’italienne, instrument de critique sociale, avec Marcello Fois, Andrea G. Pinketts, Massimo Carlotto et surtout Andrea Camilleri, qui avec son commissaire Salvo Montalbano connaît à partir de 1998 un succès colossal en Italie mais aussi dans d’autres pays, dont la France.

Espagne :

Le roman policier peine à s’implanter en terre ibérique. Sautons donc très vite à la case 1974, avec la publication de Tatouage de Manuel Vazquez Montalban (1939-2003), première apparition du privé Pepe Carvalho. Grâce à Montalban, le polar espagnol sort du désert avec les années 1980 dans une veine très noire, tenant la chronique d’une société en pleine mutation au sortir du franquisme. Se distinguent dans le genre des auteurs comme Pedro Casals, Jorge Martinez Reverte et surtout Francisco Gonzales Ledesma, dont la notoriété dépasse les frontières espagnoles (en France La Dame du Cachemire obtient le prix mystère du meilleur roman étranger en 1986). Ledesma reste cependant une exception avec Arturo Pérez-Reverte, qui exploite lui la veine du roman policier historique. Les auteurs espagnols peinent toujours à s’imposer vraiment.

Allemagne :

Le « krimi » allemand connaît quelques réussites dans les années 1920 avec les premiers romans de Franck Arnau notamment, mais s’étiole bien vite avec l’avènement du IIIe Reich. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, l’influence américaine prédomine, comme dans la plupart des pays européens. Aussi faut-il attendre le milieu des années 1960 pour voir renaître le genre outre-Rhin. Hansjörg Martin est alors le chef de file d’une génération d’écrivains de gauche qui traque les vestiges du nazisme, ou osculte les mauvais penchants de la société allemande. Ce polar sociologique laisse place dans les années 1980 à un nouveau courant qui préfère souligner les qualités littéraires possibles du genre. On peut évoquer le travail de Fred Breinerdorfer, de Jürgen Alberts ou de Pieke Biermann, le seul de ce trio traduit en France (chez Rivages). Aujourd’hui, le krimi allemand se diversifie, comme le montre l’étonnante série féline de Akif Pirinçci, les aventures du détective d’origine
turque Kayankaya de Jakob Arjouni, ou les enquêtes de la commissaire lesbienne Wertebach de Maria Gronau. Malheureusement, la plupart des auteurs allemands restent très mal traduit à l’étranger.

Suède :

L’énorme succès que connaît depuis 2000 (La Cinquième femme) en France Henning Mankell ne doit pas faire oublier la longue tradition suédoise en matière de romans policiers. Le genre connaît un réel engouement à partir des années 1940 grâce au classique tandem Friberg/Johnson lancé pour 22 aventures par Sieg Trenter. Si Trenter loûche du côté de Conan Doyle, Maria Lang est plutôt influencée par Agatha Christie, avec une série de quarante romans dont la moitié sont traduits en français. On peut également signaler à la même période
les oeuvres de Kerstin Ekman et Olle Högstrand. Mais il faut surtout retenir la saga en dix volumes de Maj Sjöwall et per Walhöö qui, de Roseanna (1965) aux Terroristes (1975), s’attache au quotidien d’un groupe de policiers suédois emmenés par le commissaire Martin Beck. Cette oeuvre majeure renouvelle le genre en Suède, en marquant l’entrée tonitruante de la réalité sociale dans le « polar venu du froid ». Henning Mankell est sans doute le plus talentueux des héritiers de la paire d’as Sjöwall/Walhöö, immité ensuite par Ake Edwardson, mais il serait injuste d’oublier quelques autres atouts comme l’auteur de thrillers Kjell-Olof Bornemark, Vidar Svensson et ses romans noirs, ou l’atypique Carl-Henning Wijmark.

Afrique :

Le polar africain se résume à quelques auteurs bien rares. Yasmina Khadra est au dessus du lot, avec une trilogie algérienne mettant en scène le commissaire Llob et dont le premier tome Morituri (1997) révèle un grand écrivain. En Afrique noire, on peut souligner le talent du Sénégalais Abasse Ndione (La Vie en spirale, 1997) ou du Zaïrois Achille Ngoye, premier africain publié à la Série Noire (Agence Black Bafoussa en 1996). L’Afrique du Sud est pour l’heure le pays le plus représenté en France, à travers le tandem policier blanc/noir-Kramer/Zondi de James McClure, les oeuvres très politiques de Wessel Ebersohn au tournant des années 1980, et la révélation en 2002 de Deon Meyer (Jusqu’au dernier) .