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Le "néo-polar" et après

mercredi 19 janvier 2005, par polars

Les années 1970 sont marquées par l’émergence d’un courant bientôt baptisé - parfois au grand désespoir de ceux qui en sont considérés comme les chefs de file - le « néo-polar ». Les événements de mai 1968 sont passés par là, et le polar se veut plus que jamais reflet de société, avec des héros de guingois, témoins d’un malaise social général. Françis Ryck est un des précurseurs de la tendance, avec ses espions marginaux qui renouvèle dès les années 1960 la Série Noire. Mais ce sont Jean-Pierre Manchette avec l’Affaire N’Gustro (1971) et A.D.G avec La Nuit des grands chiens malades (1972) qui secouent vraiment le cocottier. La critique se dépêche alors de porter aux nues cette nouvelle école, en pressant sur ses bancs Jean Vautrin, Hervé Prudon, Jean-François Coatmeur, Pierre Siniac, Pierre Magnan et Alain Demouzon, ces deux derniers se révélant bientôt un brin engoncé dans le genre policier.

Avec la fin des années 1970 et la création de deux nouvelles collections, Sanguine et Engrenage, une génération très en forme intègre ce néo-polar, avec Hervé Jaouen, Hughes Pagan, Frédéric Fajardie, Thierry Jonquet, Marc Villard. La Série Noire n’est pas en reste en publiant Didier Daeninckx, Jean-Hugues Oppel ou Tonino Benacquista. Une bien belle brochette, qui s’applique à soigner son écriture tout autant que ses intrigues, et explore des univers de plus en plus divers. Difficile, avec des écrivains de cette pointure, de parler encore de sous-littérature.

Le phénomène le plus important des années 1990 est sans aucun doute le débarquement dans le genre de remarquables romancières, bien rares auparavant. Andréa H. Japp ouvre le bal en remportant d’entrée le prix du festival de ognac en 1991 avec La Bostonienne. L’année suivante, Brigitte Aubert révèle son talent avec son roman à suspense Les Quatre fils du Docteur arch.
En 1994, Maud Tabachnik impose son tandem Sam Goodman-Sandra Khan ans Un été pourri. En 1995, le talent de Fred Vargas éclate avec son quatrième roman qui décroche le Prix mystère de la critique, Debout les morts.
Performance presque équivalente pour Claude Amoz dès son premier ouvrage Le Caveau, salué par le prix sang d’encre du festival de Vienne. Ces dames n’ont strictement rien à envier à leurs cousines anglo-saxonnes. Sur le plan éditorial, le changement notable est l’apparition au début des années 1980 des collections grands formats, qui contribuent à donner ses lettres de noblesses au genre. L’autre date importante est à l’évidence la création de la collection Rivages/Noir de François Guérif en 1986. Avec sa politique d’auteurs, la maison relance certains grands classiques anglo-saxons (Thompson, Cook), permet l’explosion d’autres (Ellroy, Hillerman) et révèle des Français de tout premier ordre (Pascal Dessaint, Dominique Manotti). Au tournant du XXIeme siècle, on ne compte plus les maisons d’édition qui lancent des collections dédiées aux romans policiers. Avec plus ou moins de bonheur, une espérance de vie plus ou moins longue. Le genre, en tout cas, connaît un succès inégalé, même s’il devient de plus en plus difficile de trouver son chemin dans la jungle de la production actuelle qui dépasse es... 1600 titres par an.